Je cherche à faire de nouvelles traces et je me méfie de mes résistances les plus fortes. C'est souvent le signe qu'il y a matière à avancer.
Monochrome Rose
mardi 31 mars 2009
Augmenter son département
Lorsque le corps trouve un nouveau chemin dans le mouvement ou danns son organisation, qu'il va là où il n'a pas l'habitude d'aller, il y a un moment suspendu entre la surprise, la peur et l'euphorie. Les cellules nerveuses viennent de créer un nouvel espace, un chemin s'est tracé dans le vide. Quelque chose s'est passé. On a la possibilité d'être autrement. Il est fréquent que la peur de la nouveauté ou l'inertie nous ramènent aux territoires connus, mais il y a là une opportunité merveilleuse "d'augmenter de son département" pour reprendre une formulation de Deleuze.
lundi 30 mars 2009
2 hémisphères, plusieurs dimensions, un tout
Le témoignage de Jill Bolte Taylor, chercheuse et neurologue,(1/2, visionner. 2/2, visionner) me relance sur les questions que je me pose, depuis quelque temps déjà, au sujet du fonctionnement des 2 hémisphères cérébraux, de leur relation au mouvement et plus globalement au fonctionnement de l'individu au sein de notre société occidentale. La proprioception (sensation interne de soi et des relations des différentes parties du corps entre elles) et la kinesthésie (sensation du mouvement) seraient reliés à l'hémisphère droit, ainsi que le seraient toutes nos perceptions sensorielles. Ceci "exploserait" en permanence comme un immense collage multi-dimensionnel en mouvement constant, dans lequel nous serions englobés. Cette sensation de globalité, de flux, d'être relié, existerait en soi, dans l'instant, sans connection linéaire aucune au passé ou au futur.
L'autre hémisphère, le gauche, fonctionnerait de façon sérielle. c'est à dire qu'il organiserait les informations de façon linéaire avec une chronologie, une hiérarchie ou tout autre forme classification. Il serait actif dans l'élaboration du langage, la parole et l'écrit de façon séquentielle. Il relierait chacune de nos expériences aux expériences passées ou à leurs projections possibles dans l'avenir. À travers cet hémisphère, nous serions distincts, séparés de notre environnement, individualisés.
Ceci me ramène à ma question sur la porosité des frontières. Il se trouve que, dans la conscience simultanée de mes deux hémisphères, je peux être à la fois :
- partie intégrante d'un tout énergétique, sans séparation d'avec mon environnement, (je suis le prolongement de ce qui m'entoure et réciproquement, les molécules se fondent dans un dégradé) et
- un individu délimité, séparé du reste, classifié en fonction de critères, les miens et ceux de la société au sein de laquelle je vis.
Je puis donc, si j'utilise mes deux hémisphères, à la fois vivre une expérience somatique, énergétique et multisensorielle et élaborer un discours, faire un calcul, planifier ma semaine. Je peux à la fois "compter la musique" et la sentir la douceur du parquet sous mes pieds. Je peux analyser une situation et simultanément être consciente des battements de mon coeur...Cela élargit considérablement le champ de possibles.
J'ai remarqué que, la plupart du temps, chez les personnes avec lesquelles je travaille, il y a une prédisposition à être plutôt sur un mode ou sur un autre et qu'il est parfois difficile de mobiliser les deux à la fois. Cela demande de la pratique. Être à la fois dehors et dedans, global et spécifique, relié et distinct, sensoriel et clair dans son discours etc... Certains y arrivent assez vite, pour d'autres c'est plus difficile...
C'est comme si l'on pouvait soi-même, à force de pratique, établir ou ré-établir des ponts disparus entre ces mondes, générer de nouvelles connections neuronales. Plus on est conscient de cette double relation à soi-même et au monde, plus elle se développe. Je ressens cela depuis quelques années. La société dans laquelle nous vivons et les modes d'apprentissage notamment de l'éducation nationale valorisent, il me semble, ce qui se relie à l'hémisphère gauche (discours, analyse, organisation du savoir, hiérarchie, etc...) En choisissant d'orienter une partie importante de mon travail (le coeur de ma pratique) sur des explorations somatiques, des investigations de textures (plastiques/sonores/corporelles), des incursions trans-disciplinaires où se mélangent les langages et les cases, j'ai le sentiment de participer à une contre-culture, non pas par esprit révolutionnaire, mais par nécessité, pour ne pas couler, pour aider à rétablir l'équilibre et la fraternité, si tant est que ce mot veuille encore dire quelque chose qui ne soit pas catalogué immédiatement. L'idéal serait pour moi de développer un accès libre au support combiné des hémisphères, d'augmenter leurs possibilités de synergie. Une lecture à plusieurs dimensions qui élargit notre expérience et nos perspectives, pour en finir avec cette idée réductrice d'une dichotomie corps esprit. Quelque chose comme ça...
dimanche 15 mars 2009
samedi 14 mars 2009
frontière/limite/transition/ligne/passage
J'interroge mon rapport à l'environnement. Où se situe la frontière entre moi (ou mon corps) et le reste?
Mon corps ne s'arrête pas à l'enveloppe de la peau. Il y a une zone au delà qui est encore moi.
Par ailleurs, le "monde autour" entre dans le corps, par l'air inspiré, les aliments ingérés, les sens. Il devient perception et matière au sein même de l'organisme.
L'extérieur n'existe qu'à l'intérieur.
Comment mettre cette frontière en question , la fondre, la rendre mobile, modifiable?
Il y a comme un dégradé entre soi et les choses, entre les autres et soi, pas de séparation définie il me semble contrairement au point de vue le plus généralement admis.
Il y a par exemple la table et il y a moi. Ce n'est pas la même chose, c'est facilement séparable. Et si cette partition était illusoire? la séparation moins définitive, plus floue? La table est aussi à l'intérieur de moi, et il se peut que mon corps se fonde ou se con-fonde avec celui de la table dans une certaine perspective. La ligne de démarcation est variable selon le point de vue, le choix d'interprétation, l'état de l'âme, la lumière ou l'heure de la journée.
Dans certains de mes films monochromes, c'est la couleur qui est le facteur de liaison, l'agent liant entre le corps et l'environnement, le monde et moi. La couleur unit ces deux territoires.
Mon corps ne s'arrête pas à l'enveloppe de la peau. Il y a une zone au delà qui est encore moi.
Par ailleurs, le "monde autour" entre dans le corps, par l'air inspiré, les aliments ingérés, les sens. Il devient perception et matière au sein même de l'organisme.
L'extérieur n'existe qu'à l'intérieur.
Comment mettre cette frontière en question , la fondre, la rendre mobile, modifiable?
Il y a comme un dégradé entre soi et les choses, entre les autres et soi, pas de séparation définie il me semble contrairement au point de vue le plus généralement admis.
Il y a par exemple la table et il y a moi. Ce n'est pas la même chose, c'est facilement séparable. Et si cette partition était illusoire? la séparation moins définitive, plus floue? La table est aussi à l'intérieur de moi, et il se peut que mon corps se fonde ou se con-fonde avec celui de la table dans une certaine perspective. La ligne de démarcation est variable selon le point de vue, le choix d'interprétation, l'état de l'âme, la lumière ou l'heure de la journée.
Dans certains de mes films monochromes, c'est la couleur qui est le facteur de liaison, l'agent liant entre le corps et l'environnement, le monde et moi. La couleur unit ces deux territoires.
jeudi 12 mars 2009
jumping & Walking
Depuis que je me suis mise à sauter, puis à marcher, quelque chose dans mon rapport au monde se modifie sensiblement.
Tout a commencé fin décembre sur une proposition de Emio Greco, qui lors d'une masterclasse nous à engagés quotidiennement à sauter. Sauter, rebondir littéralement pendant d'interminables minutes. ça a duré 5 jours. Au début, j'ai cru que je ne tiendrais pas. Les minutes s'écoulaient et l'on secouait le corps, lâchait les omoplates et les jambes, pour être "régénérés" ou quelque chose d'approchant, "lavés de l'intérieur". Il semblait ne pas avoir de clause de fin de jeu. c'était "on achève bien les chevaux". Je me disais que d'ici quelques secondes il faudrait que je m'arrête. Mais personne ne s'arrêtait et je tenais quelques secondes de plus, et puis finalement toute la période. ça durait quoi, 15 minutes? 30 minutes? Impossible à dire. Un temps impossible.
À la pause je m'effondrais et j'essayais de respirer doucement pour me rassembler, récupérer. Je n'arrivais plus à marcher. je me suis dit : "plus jamais".
Et puis 20 jours après j'ai recommencé, en musique, chez moi. 1/2 heure chaque jour. Il fallait dépasser une barrière, une résistance mentale, quelque chose en moi qui se refusait à être bousculé. Je mettais des tubes des années 70 et 80 et je sautais, je dansais. Quand je n'en pouvais plus je ralentissais, puis l'énergie remontait. Les jours où je ne sautais pas je marchais, jusqu'à marcher parfois 2h. Je me levais plus tôt je casais des sauts et des marches dans les interstices. Je faisais sauter mes élèves 10 minutes au début de chaque atelier. Épuisant et festif!
Au fil des semaines, je laisse mon scooter de plus en plus souvent et j'arpente Paris.
Je ne réfléchis pas de la même façon lorsque je marche. La locomotion du corps ouvre quelque chose dans l'agencement de ma pensée. Elle s'étend, s'allège et s'approfondit à la fois. Je croyais que j'étais en mouvement (danse, yoga, improvisation, performance, mes 20 heures de cours hebdomadaires...) et bien, je me découvre émergeant d'une fixité insoupçonnée. la place que j'occupe par habitude engendre certaines stagnations et ceci change en marchant. Quelque chose glisse et s'allège. Il y a un nouveau mouvement dans l'articulation sacro-illiaque, une libération sensible de ma mâchoire, une chaleur dans ma colonne vertébrale, de la joie... Les paumes de mes mains s'ouvrent, mes pensées se décantent. Je me retrouve alors que je ne savais pas m'être perdue.
Tout a commencé fin décembre sur une proposition de Emio Greco, qui lors d'une masterclasse nous à engagés quotidiennement à sauter. Sauter, rebondir littéralement pendant d'interminables minutes. ça a duré 5 jours. Au début, j'ai cru que je ne tiendrais pas. Les minutes s'écoulaient et l'on secouait le corps, lâchait les omoplates et les jambes, pour être "régénérés" ou quelque chose d'approchant, "lavés de l'intérieur". Il semblait ne pas avoir de clause de fin de jeu. c'était "on achève bien les chevaux". Je me disais que d'ici quelques secondes il faudrait que je m'arrête. Mais personne ne s'arrêtait et je tenais quelques secondes de plus, et puis finalement toute la période. ça durait quoi, 15 minutes? 30 minutes? Impossible à dire. Un temps impossible.
À la pause je m'effondrais et j'essayais de respirer doucement pour me rassembler, récupérer. Je n'arrivais plus à marcher. je me suis dit : "plus jamais".
Et puis 20 jours après j'ai recommencé, en musique, chez moi. 1/2 heure chaque jour. Il fallait dépasser une barrière, une résistance mentale, quelque chose en moi qui se refusait à être bousculé. Je mettais des tubes des années 70 et 80 et je sautais, je dansais. Quand je n'en pouvais plus je ralentissais, puis l'énergie remontait. Les jours où je ne sautais pas je marchais, jusqu'à marcher parfois 2h. Je me levais plus tôt je casais des sauts et des marches dans les interstices. Je faisais sauter mes élèves 10 minutes au début de chaque atelier. Épuisant et festif!
Au fil des semaines, je laisse mon scooter de plus en plus souvent et j'arpente Paris.
Je ne réfléchis pas de la même façon lorsque je marche. La locomotion du corps ouvre quelque chose dans l'agencement de ma pensée. Elle s'étend, s'allège et s'approfondit à la fois. Je croyais que j'étais en mouvement (danse, yoga, improvisation, performance, mes 20 heures de cours hebdomadaires...) et bien, je me découvre émergeant d'une fixité insoupçonnée. la place que j'occupe par habitude engendre certaines stagnations et ceci change en marchant. Quelque chose glisse et s'allège. Il y a un nouveau mouvement dans l'articulation sacro-illiaque, une libération sensible de ma mâchoire, une chaleur dans ma colonne vertébrale, de la joie... Les paumes de mes mains s'ouvrent, mes pensées se décantent. Je me retrouve alors que je ne savais pas m'être perdue.
mercredi 11 mars 2009
matériau corps
C’est parce qu’il y a eu Klein, les dadaïstes, les actionnistes viennois, les happenings, les années 70, l’art total, les punks, ect... que je peux faire ce que je fais aujourd’hui. c’est parce que certains se sont roulés dans la peinture ou ont fait des propositions extrèmes que je peux utiliser librement le matériau du corps et proposer un rapport au monde nourri de ces influences. Je regarde aussi les poupées de Bellmer, les expansions de César, les partitions chromatiques de Klee ou de Kandinsky. J’ai comme références des collaborations entre Wharhol et Merce Cunningham, les oeuvres d’Alwin Nikolaïs, les pièces de Pina Bausch. Il y a aussi Fluxus, le travail de Hannah Halprin et les films de Bill Viola... tant d’autres choses.
Mon territoire est tissé d’interrelations corps/vidéo/matière/ installation/couleur....
Mais aussi de liens entre spectacle vivant/art plastiques/performance.
J’explore des thématiques : apparition/disparition du sujet, rapport à l’abstraction, naturel/artificiel, corps/chair/image/matière, poupée/poupée cassée/chair/enfance, féminin/origine/matrice/gestation, limites/entraves/ombre/non-dit.
Mon matériau premier est le corps, somatique, organique, cellulaire, mais aussi plastique, charnel, soumis aux dictats du jugement et aux effets du temps.
Je mets ce sujet en résonance texturelle avec ce qui m’entoure, autres corps, société, capitalisme, nature, éléments, matériaux industriels, espaces.
monochromes
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